La question de savoir si un employeur en Suisse peut soumettre ses collaborateurs à un test de dépistage de drogues est juridiquement complexe. D’une part, les entreprises souhaitent garantir que leurs employés travaillent de manière fiable et sans risque pour eux-mêmes ou pour autrui. D’autre part, le droit suisse protège fortement la personnalité des travailleurs.
Cadre juridique
En Suisse, il n’existe aucun droit général de l’employeur d’imposer des tests de dépistage de drogues. La protection de la personnalité selon l’art. 328 du Code des obligations ainsi que la loi sur la protection des données fixent des limites strictes. Un test de dépistage n’est autorisé que lorsqu’il existe un intérêt prépondérant en matière de sécurité, par exemple dans les transports, l’aviation ou lors de l’utilisation de machines dangereuses.
Le principe de proportionnalité s’applique : la mesure ne doit pas aller au-delà de ce qui est nécessaire pour protéger la sécurité. Un simple « intérêt de contrôle » n’est pas suffisant.
Consentement et réalisation
Le consentement de la personne concernée est essentiel. Sans accord, un test est en principe interdit. Même en cas de consentement, le test ne peut être effectué que dans des situations justifiées et proportionnées.
On distingue différentes méthodes :
- Les tests urinaires et analyses capillaires fournissent des informations détaillées sur la consommation et sont donc considérés comme des procédures sensibles qui doivent respecter des exigences juridiques particulières.
- Les méthodes moins invasives, comme un test d’haleine pour l’alcool, sont soumises à des conditions moins strictes mais nécessitent également le consentement de l’employé.
Exemples pratiques
La jurisprudence montre que l’imposition de tests obligatoires est rapidement jugée illicite. Ainsi, une entreprise formatrice souhaitait imposer des tests obligatoires à tous ses apprentis. La commission de protection des données a jugé cette pratique disproportionnée – même si les jeunes avaient donné leur accord.
La situation est différente lorsqu’il existe des indices concrets d’une consommation de drogues (comportement suspect, démarche incertaine). Dans ce cas, l’employeur ne peut pas imposer un test, mais il peut :
- renvoyer temporairement la personne à son domicile,
- l’affecter à des tâches moins dangereuses,
- ou proposer un examen médical volontaire.
Tests urinaires et analyses capillaires en détail
Les tests urinaires détectent une consommation récente. Les analyses capillaires couvrent une période beaucoup plus longue (semaines ou mois). Pour cette raison, les exigences légales sont strictes : l’employeur ne peut utiliser ces méthodes que si l’activité comporte un véritable risque pour la sécurité et si la personne concernée y consent expressément. Les résultats ne doivent pas être exploités en détail mais uniquement répondre à la question de l’aptitude au poste.
Conséquences en droit du travail
Les conséquences pour l’employé dépendent fortement de la situation :
- Sans lien avec la sécurité et en cas de refus, aucun test n’est possible et aucune conséquence négative n’est admise.
- Pour des activités liées à la sécurité, un test peut être autorisé si cela est prévu par le contrat de travail ou un règlement et que l’employé y consent. Les résultats doivent se limiter à l’aptitude.
- En cas de soupçon concret sans consentement, seules des mesures plus douces sont possibles : renvoi à domicile, autre affectation, examen médical volontaire.
- En cas de comportement répété et dangereux, l’employeur peut émettre un avertissement ou, en dernier recours, licencier. Il faut toutefois tenir compte du fait que la dépendance est souvent considérée comme une maladie, ce qui impose à l’employeur un devoir d’assistance.
Conclusion
En Suisse, les employeurs ne peuvent pas imposer librement des tests de dépistage de drogues. Trois conditions sont déterminantes : un lien clair avec la sécurité, le consentement de l’employé et la proportionnalité de la mesure. En pratique, il n’existe donc pas de droit général aux tests ; ils ne sont autorisés que lorsqu’il s’agit véritablement de protéger la sécurité des personnes et du lieu de travail.
Informations complémentaires
Pour en savoir plus sur la détection des substances, consultez nos articles :
- Durée de détection des drogues dans l’urine
- Analyse des cheveux pour la détection des drogues en Suisse